La bergerie de la Favouillane : le Versailles camarguais en péril…
Chef-d’œuvre en péril… Qui se souvient encore de cette émission culte de la télévision française présente à l’écran dans les années 1960 et 1970 ? Si elle existait encore, la bergerie de la Favouillane y aurait sans aucun doute sa place.
Dans un petit coin de Camargue, au domaine du Radeau dans la commune de Port-Saint-Louis-du-Rhône (propriété du Grand Port maritime de Marseille), la bergerie de la Favouillane demeure le dernier vestige de l’architecture camarguaise à abside et couverture de roseau.
Elle est de même « la dernière bergerie à couverture végétale du delta, qui témoigne, depuis l’époque romaine, d’une architecture liée à l’élevage ovin. Bien que sa valeur patrimoniale et la nécessité de la conserver soient régulièrement rappelées depuis le début des années 1970, et qu’elle ait été restaurée en 1981, elle sera très probablement et définitivement perdue si des travaux ne sont pas entrepris en 2018 », explique Patrick Fabre, directeur de la Maison de la transhumance, située au domaine du Merle, sur la commune de Salon-de-Provence.

Crédit Photo : Maison de la transhumance.
Mesurant 50 m de long sur 12 m de large et 8 m de haut, la charpente est « à deux rampants, inclinés à 45°, supportés par 9 fermes prenant appui, chacune, sur deux contreforts latéraux. Terminée au nord en abside pour résister au mistral, elle s’ancre, au sud sur un mur pignon triangulaire ».
Pouvant abriter entre 800 et 1 000 ovins, cette bergerie, restaurée une première fois sous l’œil vigilant de Jean-Claude Duclos, conservateur honoraire, administrateur de la Maison de la transhumance, est un précieux témoignage architectural de l’activité pastorale du delta rhodanien, et ce depuis des siècles. Des siècles ? Des millénaires plus exactement… Jugez plutôt.
Construite sur le même modèle que les bergeries antiques de Crau mises au jour par l’archéologue amateur Otello Badan dans les années 1990, « ces bergeries antiques de 50 à 60 m de long, couvertes de roseau et terminées en pointe au nord, présentent de nombreuses similitudes avec celle de la Favouillane. La continuité de ce type d’architecture, particulièrement bien adaptée au milieu et à l’activité pastorale, est alors démontrée. »
Afin de la sauver, le 25 janvier 2018, une réunion publique s’est déroulée au musée de l’Arles antique à Arles, réunissant autour d’une table ronde les différents protagonistes qui l’ont organisée : la Maison de la transhumance, le Museon Arlaten, le Parc naturel régional de Camargue, Les Amis du vieil Arles, l’Académie d’Arles et bien sûr le Grand Port maritime de Marseille.
Le but de cette restauration est non seulement de sauvegarder ce patrimoine architectural séculaire mais aussi de permettre la continuité d’une activité pastorale présente depuis la plus haute Antiquité.
Un appel aux dons a été lancé pour participer au financement de la rénovation de la bergerie de la Favouillane, ce « Versailles camarguais », ainsi que l’a appelé l’éminent historien Jean-Maurice Rouquette, ancien directeur de l’Académie d’Arles et conservateur honoraire du musée de l’Arles antique, spécialiste de la période romaine.
Parce que Versailles sera toujours Versailles… et pour que la bergerie de la Favouillane soit toujours la bergerie de la Favouillane.
Sandrine KRIKORIAN
Docteur en histoire de l’art et guide-conférencière,
spécialiste du pastoralisme et de la transhumance en Crau.
http://sandrinekrikorian.com/
Coordonnées de la Maison de la transhumance :
Patrick Fabre
Maison de la transhumance - Domaine du Merle
Route d’Arles
13300 Salon-de-Provence
www.transhumance.org
mail : mdt@transhumance.org